Le spectacle qu’offrent aujourd’hui nos sociétés démocratiques modernes est lamentable. Cette situation nous amène à paraitre ultracistes, scrogneugneux et grognons. La démocratie qu’elles nous laissent voir est vraiment en décrépitude. La société en s’élargissant s’est abaissée. La démocratie a gagné la mort.[1]
La dernière visite du Pape Benoît XVI en France nous a permis d’appréhender la bassesse de la société occidentale qui ne croit qu’au culte de la performance et de la réussite sociale. Les intellectuels ont célébré la Raison à la rue des Bernardins comme si cette Raison à laquelle ils adhéraient tous, pouvait exister, seule, sans la Foi. Le Saint Père les a recentrés sur leurs racines chrétiennes occidentales : le spirituel en fait grandement partie, comme un trésor inestimable. Non pas un vernis de spiritualité, de rites superficiels mais la pratique au quotidien. Ne pas avoir honte d’afficher ses valeurs chrétiennes, en montrer des signes extérieurs, pourquoi pas. La raison sans la foi est légère, la foi sans la raison est faible. C’est une chose assez généralement reconnue que l’Europe doit au Saint-Siège sa civilisation, une partie de ses meilleures lois, et presque toutes ses sciences et ses arts.[2]
La laïcité positive a aussi retenue l’attention des journalistes et des hommes politiques. Il ne faudrait pas en faire un slogan publicitaire comme c’est souvent le cas dans nos démocraties modernes. Parler de laïcité positive et ne pas mettre les pieds dans une église, ou bien divorcer au gré de ses caprices est très problématique. La laïcité derrière laquelle se cachent nos sociétés modernes, ne se résume-t-elle pas simplement à un athéisme déguisé, un athéisme qui opposerait les droits humains aux droits de Dieu. Qui sont ceux qui se cachent derrière ces principes intangibles de laïcité ? Je n’en connais pas de véritables chrétiens. Y a-t-il des garde-fous à la spiritualité ? Tout ce qui constitue un frein à la spiritualité est anti-spirituel, a-spirituel et cela est d’une grande gravité à la propagation de la foi. Nos pays actuels sont en train d’être tout simplement décatholicisés. Il nous faut réagir.
En poursuivant notre réflexion, nous voudrions dé-politiquer un peu, compte-tenu de la trop grande place que la politique occupe dans notre société contemporaine. Qu’appelle-ton démocratie aujourd’hui ? La démocratie, pense-t-on c’est le droit d’avoir des élections et le droit de vote. C’est aussi respecter les droits de l’homme. Mais en regardant de très près nos hommes politiques dans leurs véhicules aux vitres teintées, aux costumes sommes, nous apercevons une immense défilade de croque-morts amoureux, de croque-morts politiques, de croque-morts bourgeois. Le noir du véhicule qui se marie avec le noir de l’habit, la livrée uniforme, le véhicule semblable, signifient une égalité de fourmis, le triomphe du nombre, symbolisé par la vie moderne. Fourmillement de la vie, fourmillement de la ville. Le suffrage universel de nos jours est le reflet de la souveraineté populaire, dans nos démocraties. Il s’agit du droit du nombre, le droit divin du nombre et nous opposons ce droit du nombre au droit divin. Or ce suffrage universel, nous le pensons, une espèce de bouillie gélatineuse. Avec le suffrage universel, n’importe quel petit imbécile accède à la magistrature suprême. Ce suffrage universel donne que l’homme le plus médiocre arrive à nous gouverne par le hasard du scrutin. Peut-être faudrait-il opter ici pour un élitisme où ce sont les plus compétents qui soient portés au suffrage universel.
De nos jours, la démocratie est devenue un débordement de vice inouï, un jeu de mensonge, un abus de force, un enseignement de vice, une maladie sociale, et un enseignement d’injustice. Elle est une démocratie prostituée. Chacune des élections, dans tous les pays démocratiques, ouvre une vue d’ensemble sur la bêtise et la méchanceté des habitants. Peut-on imaginer un système de gouvernement plus idiot que celui qui consiste à remettre, pour un certain nombre d’années, le sort d’un pays, non pas au peuple, mais à la foule. D’une façon cyclique, chaque pays moderne actuel désigne ses représentants dans un accès de catalepsie alcoolique. Alors, devons-nous définir l’action que nous menons, devons-nous la décrire. Elle se résulte en un seul mot : la métapolitique.
Des hommes d’Etat ont commencé à écrire, ou encore, ce qui revient au même, des écrivains écrivent pour les hommes d’Etat : ce sont ceux que nous appelons des négriers. L’histoire de leurs vies ou leurs projets de vie expriment bien leur envie de domination. Ces hommes d’Etat falsifient l’histoire. Telle est leur volonté de puissance. Ils mentent tous mais en même temps, ils offrent un spectacle effrayant. Car ce qui est qualité dans l’écrivain, est parfois vice dans l’homme d’Etat, et les mêmes choses qui souvent ont fait faire de beaux livres peuvent mener à de grandes révolutions. En outre, la théorie est le démon de l’homme d’Etat. Mais « diantre », pourquoi aime-t-il écrire ? La raison est insuffisante en politique, parce que l’action humaine ne se fonde pas sur la raison seule. Les passions, à la fois individuelles et collectives, exercent leur influence sur les affaires, et les intérêts troublent la vue.
La dernière crise financière internationale, dans laquelle nous sommes plongés depuis peu (par la faillite de la société de prêts immobiliers Lehmann Brother) a montré comment l’homme contemporain vit dans l’illusion et l’artifice. Beaucoup de personnes à l’heure actuelle vivent au dessus de leurs moyens. Elles s’endettent énormément et croient posséder, alors qu’en fait, elles n’attrapent que du vent. Notre Maître nous a enseignés dans l’Evangile que celui qui a, recevra davantage. Cela nous interroge sur la qualité de notre avoir, et non sur la quantité. Si nous possédons beaucoup de choses qui ne sont que des dettes, c’est que nous n’avons attrapé que du vent. Nous sommes ruinés du jour au lendemain. Chez l’כdzukru, du Sud de la Côte d’Ivoire, l’homme riche est le gbreŋgbi (celui qui a souffert) (l’idz gbré gbi). Il a souffert longuement (gbi) pour posséder ce dont il dispose aujourd’hui. Alors sa richesse lui dure entre les mains. Sinon l’homme criblé de dettes et qui vit dans l’illusion, dilapide l’argent des autres. Il n’a pas souffert pour l’acquérir, alors il est dilapidateur et dissipateur. Ce que nous appelons richesses aujourd’hui factice, postiche et emprunté. Le sage a bien raison de dire : « Une fortune acquise à force de mensonge : illusion fugitive qui conduit à la mort. »[3] N’est-ce pas le péché des origines de nos sociétés d’aujourd’hui ?
Nos sociétés tombent dans la bondieuserie en déclarant que l’homme est naturellement bon et que c’est la société qui le corrompt : principe démocratique rousseauiste. En fait de quels hommes parlons-nous ? Il n’y a pas d’homme en soi. Il y a des Ivoiriens, des Burkinabés… L’homme en soi n’existe. Et nous lui avons placardés des droits…humains dont nous faisons le principe sacrosaint de nos démocraties : c’est un péché des origines.
Père AKE Patrice Jean
[1] COMPAGNON(Antoine).- Les antimodernes de Joseph de Maistre à Roland Barthes. (Paris, Gallimard 2005), p. 13
[2] COMPAGNON(Antoine).- Les antimodernes de Joseph de Maistre à Roland Barthes. (Paris, Gallimard 2005), p. 158
[3] Proverbes 21,6
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